Kitenda
et son devenir : le point de vue d’un historien
Le
septième jour du moi de juillet dernier, à l’occasion du soixante quinzième
anniversaire de la paroisse de Kitenda fêtée deux ans plus tard, monsieur
Venant Tekila Zay a fait un exposé sur le devenir de Kitenda. Nous vous
présentons l’intégralité dudit exposé sur cette page. A vous à en tirer les
leçons qui s’imposent. CIM
KITENDA ET SON DEVENIR : LES LECONS DE L’HISTOIRE
Chers
Amis,
En
ce début de 3ème millénaire dominé par les Nouvelles Technologies de
l’Information et de la Communication(NTIC), nous vivons dans un monde
globalisé. Tout se sait, tout se communique, à une vitesse vertigineuse, à
quelque coin du globe où l’on se trouve.
Ainsi,
nous vivons dans un village planétaire, en continuelle interaction. Dès lors,
il est inconvenable, voire impossible de vivre cloisonné, enfermé, sans contact
avec le monde extérieur.
A
cet égard, permettez-nous d’ouvrir une parenthèse pour saluer ici l’heureuse
initiative des Sœurs de Notre-Dame de Namur qui ont permis de
« désenclaver » Kitenda en le connectant à l’internet, et partant, au
reste du monde. Il s’agit là d’un progrès notable que l’on ne saurait décemment
ignorer et qui mérite une chandelle. Notre vœu le plus pressant est de voir,
dans un proche avenir, tout Kitenda naviguer sur le net. Cela passe par le transfert des compétences
au bénéfice du plus grand nombre et ce, de manière durable. Telle est, du
reste, l’essence même du développement. Nous y reviendrons.
Nous
disions que des groupes, des collectivités d’hommes et de femmes ne peuvent
plus vivre de manière étanche, en s’ignorant mutuellement, car ce monde
globalisé comporte des défis immenses. Des intérêts sociaux, économiques et
culturels s’affrontent. Dans ce contexte de concurrence implacable, seuls survivront, les forts.
Aussi,
voit-on des sociétés multinationales fusionner pour faire face à la
concurrence, et des groupements régionaux se créer pour mieux défendre leurs
intérêts ?
L’heure
est donc à la conjonction des efforts, à la mise en commun des ressources, à
l’association des intelligences pour garantir le succès.
Comme
vous le voyez, Kitenda ne peut marcher avec assurance vers des lendemains qui
chantent en pleurnichant ou en recherchant l’aumône, les bras ballants « moko ma kuyala » !
Il
nous faut réfléchir, lever des options et agir
pour notre épanouissement d’abord, pour l’ensemble du diocèse et de la nation
ensuite.
Faute de le faire, nous nous trouverons
écrasés et marginalisés car dans ce nouveau monde qui est le
nôtre, il n’y a pas de place pour les
faibles, les attentistes, les improductifs. La sagesse yaka répond en
échos :
« N’sangi malafu kala yi
vunzu »
« A ngwa thata, ngemene
ditata »
« Luzitu lo mbungu,
n’dimba »
L’histoire
est, avec la langue, la composante essentielle de la conscience des peuples. De
ce fait, recouvrer sa mémoire, sa conscience historique, est une nécessité
vitale.
« L’arbre
monte en s’enfonçant dans la terre nourricière », écrit BIRAGO DIOP.
« Sola
khuku, ngwa vwa n’sasa. Buta mwana ngwa vwa n’tekolo ».
L’histoire,
on le sait, est un récit explicatif des faits humains passés, jugés
authentiques et avérés. Et le passé n’éveille notre intérêt que dans le mesure
où l’homme y joue un rôle déterminant dans la vie d’un groupe, d’une
collectivité, d’un peuple, voire de la société entière.
Nous
étudions l’histoire, non pour nous replier sur nous-mêmes ou pour nous délecter
du passé, mais dans le but de tirer des leçons permettant de gérer le
présent et de construire le futur de manière rationnelle et dynamique.
L’histoire développe le sens critique et la réflexion.
Voilà
pourquoi, dans le cadre de la célébration du jubilé de diamant de notre
paroisse, il nous a paru opportun de présenter cet exposé sur l’historique de
Kitenda depuis sa fondation en 1938 jusqu’aux années 1960.
Précisons
tout de suite que nous ne ferons pas d’exposé magistral, mais nous vous
présentons, à grands traits, les étapes et les moments les plus marquants de
cette histoire, suivant le canevas que voici :
1. Genèse et fondation
2. Consolidation et
croissance
2.1. Construction
2.2. évangélisation
2.3. enseignement
2.4. santé
Cfr ouvrage de
l’Auteur : « Kitenda :
Poste de mission catholique et foyer culturel au Sud-Kwango(1938-1960) »
QUE
CONCLURE ?
Outre
l’annonce du message du salut qui était sa motivation principale, force est de
reconnaître que l’action missionnaire catholique dans la contrée de Kitenda fut
à l’origine des progrès matériels évidents et de certaines transformations
sociales substantiellement les mêmes que celles observées ailleurs dans
d’autres paroisses.
Nous
pourrions épingler notamment les innovations suivantes. Voir pp 67-68 : n° 1 à 9
Néanmoins,
l’on pourrait se demander si, ces éléments nouveaux, replacés et analysés dans
le contexte de leur émergence, à savoir la colonisation et la politique
paternaliste belges, étaient réellement porteurs de développement pour les
bénéficiaires.
Nous
estimons pour notre part que le développement ne saurait être une manne du ciel
ni le fruit de la charité, mais il découle d’une action consciente de
l’individu ou d’une volonté organisée de la communauté. Autrement dit, le développement prend racine dans la
conscience de l’individu ou du groupe, intègre toutes les dimensions de la
personne humaine et s’exprime par un plus grand sens de responsabilité, la
liberté et la capacité d’opérer des choix et la prise en mains de sa destinée.
Voilà
pourquoi nous concluons que malgré le progrès irréfutables qui accompagnaient
l’évangélisation, l’objectif principal du salut de l’homme en général et de la
population de Kitenda en particulier, ne fut qu’imparfaitement réalisé, à cause
notamment de l’insuffisance de dialogue entre les protagonistes d’une part et
de la forte empreinte du paternalisme d’autre part.
Aussi,
tirant les leçons du passé, voudrions-nous plaider pour une dynamique
novatrice à 4 piliers suivants :
1° Vivre l’évangile.
Ne devez rien à personne si ce
n’est de vous aimer les uns les autres ; car celui qui aime les autres a
accompli la loi » (Romains 13, 8)
En
effet, l’amour est la base de la vie du Christ, le ciment de la société. Là où
règne l’amour, il n’y a pas de place pour l’envie, la haine, la malveillance,
l’égoïsme, le sectarisme, le mépris, la condescendance, l’instinct de puissance
« libido dominandi », etc.
2° Dialoguer en permanence
« Nzioko kazitilako
n’komb’andi ! »
L’antipathie
et l’intolérance réciproques doivent faire place à la cohabitation pacifique et
à la tolérance mutuelle et ce, dans l’esprit du Concile Vatican II(1964) qui
prône le dialogue interreligieux et en dessine les contours.
En
effet, le dialogue implique la reconnaissance de l’autre, le respect de ses
convictions et le droit à la différence.
Il
est urgent que nos agents pastoraux, à quelque confession qu’ils appartiennent,
s’inscrivent dans cette dynamique, qu’ils coopèrent résolument et franchement
pour travailler au salut intégral de l’homme créé à l’image et à la
ressemblance de Dieu.
« N’avons-nous
pas tous un seul Père ? N’est-ce pas un seul Dieu qui nous a
créés ? » (Mal 2, 10)
3° Conscientiser afin de s’assurer de l’adhésion la plus large possible
de la population
« Nkooko kalumbila…
matadi ! / Nzadi kendila khonda… buhika ! »
4° Faire participer et responsabiliser afin de combattre
l’infantilisme et la passivité et de garantir la pérénité des projets mis en
œuvre.
« Mutu basia mu n’kuka
nzamba, bamona ye inonga, bamona ye imaku. »
Certes, ces pistes ne
sont pas limitatives et pourraient être affinées. Mais elles peuvent constituer
le socle d’une nouvelle approche annonciatrice d’un avenir radieux pour la
population de Kitenda qui nous est chère, autant que pour tous les serviteurs
de Dieu qui y sont attachés.
Kuluwi
koloko mbe… mbena !
Je
vous remercie.
Kitenda,
le 7/07/2014
Venant
TEKILA KAPAMBA-ZAY